5.11.05

En feu

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Après avoir lu le dernier post du toujours excellent Neev au sujet des violences dans les banlieues, j'avoue qu'il a touché pile sur plein de choses
Je partage son point de vue qu'aucune violence n'est excusable, que s'en prendre à la voiture de son voisin, tabasser le mec en bas de l'immeuble, caillasser le pompier qui vient éteindre le feu, mettre au chomage les caissière du supermarché qui vivent les mêmes galères...bref, tout ça c'est de la connerie pure et simple.
Mais, je suis partagé entre compréhension et sanction.

Compréhension : bien sur que la vie dans les banlieues, ce n'est pas rose. Bien sur que les familles sont touchées de plein fouet par le chômage, par la discrimination. Bien sur qu'elles n'ont pas les mêmes chances que les autres. Bien sur qu'à force d'être farci de culture de violence dans le rap, les films, les valeurs ne sont plus les mêmes. Bien sur qu'il y a un laxisme parental, une démission, une tolérance qui explique les dérives. Oui je comprends qu'on puisse en arriver là.
Je comprends mais je n'excuse pas.
Parce que moi aussi j'ai vécu dans une banlieue difficile. Ma mère nous élevait seule, avec un salaire de femme de ménage. On vivait dans un immeuble pourri, dans un quatier pourri. Oui à l'école, j'aurai pu être tenté de foutre le bordel, d'aller traîner dehors avec ceux qui ne foutaient rien. Ma mère bossant toute la journée, ca aurait été facile d'aller traîner dans les terrains vagues, les caves et faire des conneries avec les autres.
Pourtant je ne l'ai pas fait. Pourquoi ? Je ne sais pas. Mais je me suis accroché aux études. Le bac. La fac. Le bac+5. Ouais.

Alors oui, d'un coté je comprends mais je ne peux pas excuser. Parce que j'ai vécu aux mêmes endroits et vécus les mêmes galères et que je n'ai pas pour autant foutu le feu aux voitures au bas de mon immeuble.

Non, il ne peut pas y avoir de compromission. Il faut sanctionner les casseurs.
Durement. La tolérance, c'est la porte ouverte aux limites floues, au recul de la loi. La loi est valable pour tous.
Bien sur on peut comprendre. Comme je peux comprendre la femme qui va voler de quoi manger pour ses enfants dans le supermarché du coin. Comme je peux comprendre le type au chômage qui va braquer une banque. Mais même si on comprend, on ne peut accepter que tous les types au chômage aille faire un hold up!!

Mais c'est sur que je suis mal à l'aise. Je me dis que c'est toute une culture qu'il faut changer. On a accepté sur nos chaines la déferlante des séries et films américains où la violence est érigée en symbole, où le gangster est respecté. On accepte que nos enfants écoutent certaines formes de musiques qui prônent la violence...
Non je ne suis pas pour la censure. Mais il ne faut pas s'étonner ensuite qu'une contre culture s'érige dans les banlieues.
Tout jeune passe par une phase de révolte. Moi aussi j'écoutais des musiques violentes, regardait des films violents. Sauf qu'à coté, j'avais ma mère qui était là, donnait son avis, reparlait des valeurs à avoir. Même si ca me gonflait, j'entendais.
Je crois que la société est beaucoup trop tolérante face à ça, il ne faut pas interdire, mais il faut mettre de la parole.
Exemple : Kill Bill. Pour moi, bon film, mais j'y vois tous les clins d'oeil de Tarantino, les rappels, le second degré.
Un jeune qui le voit va se le prendre au premier degré, brut. Apologie de la violence, point barre.
Qui sera là, quel adulte lui donnera les mots pour comprendre la dérision, les références dans le film ?
Personne d'autre que ses potes avec qui on sera mort de rire en disant "putain sa race, comment elle te l'a décapité". Pis on rigolera bien.

C'est finalement plus la société qui devrait faire attention au laxisme et à la tolérance qui s'installe.
Non la violence ne peut être un langage, je ne veux pas l'accepter.
Il faut la combattre fermement aujourd'hui et ne pas la laisser passer ou l'excuser. Mais dans un deuxième temps, s'attaquer aux choses plus profondes. Si on le peut encore.
Et pis merde, quand je parle des valeurs que l'on perd, j'ai l'impression d'être un vieux con.

4 Comments:

At 12:46 PM, Anonymous Anonyme said...

Si c'est être un vieux con d'avoir raison, alors tu es un très, très vieux con. :-)

 
At 3:35 PM, Anonymous Anonyme said...

Neev et Remboy, j'ai bien apprécié vos deux entrées. Je me permettrai de commenter, mais avec retenue et je ne jugerai pas de la situation spécifique, puisque je suis loin, que ce n'est pas mon pays et que je ne possède pas la vérité. Mais il me semble que ce qui se passe chez vous est malheureusement possible partout et n'est pas exclusivement dû au contexte social et politique spécifique actuel de votre pays. Cela me semble symptomatique d'une époque, de problèmes à la fois personnels et collectifs, et d'une dérive à la fois personnelle et collective. À titre d'exemple, boiteux peut-être, les débordements de ce genre parfois causés, dans un continent ou un autre, par de simples événements sportifs. (Et c'est sans parler bien évidemment des conflits armés actuels peu justifiables.) C'est absolument désolant et on se sent, comme individu, triste, inquiet et terriblement impuissant. Et on ne sait pas qui ou quoi renversera ce courant.

 
At 5:56 PM, Blogger remboy said...

Neev, fondons le club des jeunes vieux, on devrait pouvoir recruter facile alors.
Sylvia, tes passages ici sont toujours appréciés à leur juste valeur

 
At 6:56 PM, Anonymous Anonyme said...

Moi aussi, j'avoue hésiter beaucoup sur l'interprétation des évênements vandales et pyrophiles des derniéres semaines.

Mais, sur la question de la violence dans les médias... Je crois que ça, c'est plus un symptome douloureux, ou une maladie opportuniste, qu'une cause.
Essentiellement parce que la violence comme spectacle - de divertissement ou non - est présente depuis bien longtemps avant Van Damme.
Bon. Deux mecs qui se battent à mort au milieu d'un public hurlant. Fight Club ? non, les jeux du cirque romain.
Un mec qui tue son pére, fait l'amour sa mére puis se mutile avant de s'enfuir à moitié fou. Le prochain Haenke ? Non, Oeudipe, de Sophocle.
L'histoire d'un homme qui enferme sa femme chez lui, et qui a pendu toutes les précédentes à des crochets dans sa cave. Un scénar pour un film à la Seven ? Non, Barbe-bleue.
L'image d'un homme torturé qui se reproduit à travers le monde, avec des détails bien sanglants... Une légende urbaine ? Nan, Jesus sur la croix.
Une émission où s'empilent récits de guerre, crimes, images de souffrance... Le prochain concept raccoleur de téléréalite ? Non, le JT.

Je ne crois pas que le spectacle de la violence augmente réellement la violence.
Je crois que nous vivons dans un pays où la violence réelle (guerre, meurtres, tortures, viols) a réellement baissé. Tout en demeurant un société violente, qui n'assume pas de l'être. On se raconte des histoires ou on va balancer un cocktail molotov dans une bibli.. SI la violence n'est pas un langage, notre société l'écoute quand même beaucoup.
Même nos réactions de citoyens bien tranquilles en sont une preuve.
Qu'est ce qu'on a de violent, nous ? Elle vient d'où, la peur ?

Je crois aussi qu'il faut penser nos valeurs. Mais pas seulement pour dire que la violence c'est le mal... C'est juste une petite partie de la chose.

 

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